Boisé des Hirondelles : Les contribuables en otage
La Fondation du Mont-Saint-Bruno est très déçue de la décision de la Cour supérieure du Québec, qui donne raison à Sommet Prestige Canada dans le procès du boisé des Hirondelles.
Le jugement Granosik conclut à l’expropriation déguisée. C’est donc dire que par son règlement de 2018 encadrant la coupe d’arbres dans les milieux naturels d’intérêt, la ville de Saint-Bruno-de-Montarville aurait réduit de manière si importante les droits du Sénateur Paul J. Massicotte face à l’utilisation de son boisé qu’il en resterait propriétaire, mais ne pourrait plus l’utiliser. Est-ce vraiment le cas ?
Si on présume que la seule option pour ce terrain est le développement domiciliaire, il pourrait s’agir en effet d’une expropriation déguisée. Mais, comme le gouvernement du Québec a invoqué en 2014 la Loi sur la conservation du patrimoine naturel et refusé d’émettre un permis de développement, cette option est douteuse.
Tout comme les autres résidents du quartier, le Sénateur Massicotte peut marcher dans sa forêt, faire de l’acériculture artisanale, l’aménager pour favoriser la biodiversité, cueillir des champignons sauvages ou encore, s’en défaire au coût du marché.
Pourtant, le jugement de la Cour change complètement la donne. Si la ville de Saint-Bruno-de-Montarville souhaite conserver ce milieu naturel de grande valeur écologique, qui ne fait qu’un avec le parc national, elle devra payer.
La ville doit payer… mais qui est la ville au juste ?
Pour la suite des choses, la ville a trois options. Elle peut porter le jugement Granosik en appel ou encore tenter de conclure une entente de gré à gré avec le propriétaire pour acquérir et protéger le boisé. La troisième option est d’accepter une future décision du tribunal établissant l’indemnisation à verser au Sénateur. N’importe l’avenue, ce sont les contribuables qui paieront la note.
Il est temps que le gouvernement du Québec cesse de prendre les citoyens et citoyennes en otage parce qu’une loi ne répond plus aux besoins de notre société et à nos obligations en matière de protection de l’environnement.
La loi a besoin d’être modernisée
Il y a 50 ans, quand les grandes superficies étaient au cœur de la spéculation immobilière bon marché, on ne connaissait pas la valeur inestimable des milieux naturels pour la survie des espèces, dont l’espèce humaine. Les concepts de biodiversité et de changements climatiques n’étaient pas dans l’imaginaire et encore moins dans la législation du pays.
L’esprit de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel ne sont aucunement reflétés dans le concept de l’expropriation déguisée.
Avec peu de moyens financiers et juridiques, il n’est pas surprenant que les villes soient pénalisées face à l’appétit des promoteurs et aux menaces de poursuites.
Les municipalités demandent une modernisation de la Loi sur l’expropriation afin que les coûts d’acquisition soient calculés selon la valeur marchande la plus raisonnable de la propriété et non à la hauteur des profits escomptés.
« Un organe gouvernemental peut très bien changer de politique, élire de nouveaux dirigeants et modifier ses objectifs collectifs. Il s’agit par définition de l’expression démocratique parfaite de notre système de gouvernance. Toutefois, cette même collectivité doit assumer les conséquences de ses choix et ne pas faire porter à un seul citoyen les effets de ses décisions, peu importe leur légitimité ou leur opportunité, en l’absence de législation explicite qui l’autorise. »
Juge Lukasz Granosik
Une autre option s’offre au Sénateur Massicotte
Tout comme les élus, les hommes d’affaires ne doivent plus échapper aux conséquences de leurs décisions.
Le Sénateur Massicotte serait-il ouvert à une autre option pour le boisé des Hirondelles ? En faire don à la ville de Saint-Bruno afin qu’il soit reconnu comme réserve naturelle. Ou à tout le moins, un don équivalent à l’excédent de la valeur marchande et pour lequel il recevrait un reçu qui réduirait ses impôts.
Les citoyens et citoyennes de Saint-Bruno-de-Montarville se sentiraient moins pris en otage et lui en seraient sincèrement reconnaissants.