S’amuser tout en respectant la nature
Plus de deux millions de personnes visitent le mont Saint-Bruno annuellement.
Elles y trouvent un refuge aux multiples boisés, des lacs et ruisseaux, un vieux moulin, des vergers, un centre de ski et un réseau de sentiers au cœur d’un parc national qui unit les municipalités de Saint-Basile-le-Grand, Saint-Bruno-de-Montarville et Sainte-Julie.
Mais, la demande dépasse largement l’infrastructure récréative existante. Il en résulte des usages non-respectueux des milieux naturels et la dégradation des écosystèmes.
Le président de la Fondation, Alain Fréchette, et la coordonnatrice du projet pour améliorer la cohabitation entre l’humain et la nature, Anick Bribosia, ont accepté de nous en parler.
FMSB : Pourquoi est-il important de conserver les milieux naturels du mont Saint-Bruno ?
AF : Les écosystèmes du mont Saint-Bruno sont fragilisés par l’étalement urbain et le réchauffement climatique. Au Québec, les milieux naturels représentent en moyenne 17 % du territoire. En Montérégie, cette moyenne est à 4 %.
Lors de la COP 15 de décembre 2022, le gouvernement du Québec a signé un accord dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique pour protéger 30 % des milieux naturels de son territoire d’ici 2030. Nous sommes très loin de cette réalité en Montérégie. La protection des milieux naturels est donc plus urgente que jamais chez nous.
FMSB : Parlez-nous de votre projet…
AF : Le mont Saint-Bruno est un noyau de biodiversité d’une grande valeur écologique, non seulement l’aire protégée par la Sépaq, mais aussi le pourtour du parc national.
Le but du projet est de trouver des solutions aux problèmes des randonnées hors sentiers balisés. La pratique d’activités plein air en dehors du réseau existant augmente les perturbations sur l’ensemble du milieu, compromettant à la fois la biodiversité et la protection des écosystèmes. C’est pourquoi Anick Bribosia et sa collègue Françoise Dagouret feront, dans un premier temps, un inventaire des sentiers balisés et non balisés de la région.
FMSB : Quelles activités de plein air ont un impact sur les milieux naturels ?
AB : Les activités telles que le vélo de montagne, la randonnée pédestre (avec ou sans son chien), le ski et la raquette ont toutes un effet cumulatif et significatif sur les milieux naturels.
Même sur les sentiers balisés, il est important de promouvoir une utilisation responsable et durable des milieux naturels en minimisant l’impact de la randonnée. Ceci comprend respecter la règlementation locale et suivre les principes « sans trace » (« Leave No Trace Principles »).
L’utilisation non respectueuse des sentiers peut avoir des conséquences dévastatrices à plusieurs niveaux.
FMSB : Pourquoi l’infrastructure actuelle pour le plein air ne répond plus à la demande ?
AB : L’augmentation de la fréquentation et l’engouement pour des sports comme le vélo de montagne en sont les principales raisons. Étant à proximité de Montréal, le mont Saint-Bruno est devenu une destination populaire pour le plein air, particulièrement depuis la pandémie.
Il est intéressant de noter que lorsque le ministère de la Défense nationale a décidé de fermer ses 15 sentiers balisés à l’intention du vélo de montagne afin de décontaminer le sol de son terrain, les cyclistes se sont retrouvés avec aucune autre option autorisée dans la région. Mais, la passion pour ce sport est bien ancrée. On a donc transféré la pratique du vélo tout terrain dans les boisés et sur les terrains en flanc de montagne, ainsi que sur les sentiers du parc national tôt le matin.
De plus, les ressources financières des propriétaires qui doivent maintenir l’infrastructure sont limitées. Il est de plus en plus difficile pour eux de créer et maintenir des zones spécifiques pour différentes activités afin de minimiser les conflits et les impacts environnementaux.
FMBS : Pourquoi est-ce important de trouver une façon de cohabiter ?
AB : Tout comme les écosystèmes rendent des services essentiels aux humains (maintien de la qualité de l’air, la séquestration du carbone, la filtration et la rétention de l’eau, la régulation du climat, etc.), le plein air offre des bénéfices incontournables, particulièrement au niveau de la santé.
N’oublions pas que les milieux naturels et le plein air offrent aussi des retombées sociales et économiques importantes aux municipalités et aux entreprises.
Il faut rétablir un équilibre dans la cohabitation à la fois pour le bien-être des citoyens et citoyennes et pour celui des milieux naturels.
G à d : Vanessa Charbonneau, Anick Bribosia, Françoise Dagouret, Jean-Philippe Létourneau et Bryan Osborne sur un terrain de Nature-Action Québec à Sainte-Julie (Photo : Tanya Handa)
FMBS : Que souhaitez-vous accomplir avec votre projet de cohabitation et respect des usages ?
AF : Parmi les actions prioritaires du Plan de conservation du mont Saint-Bruno 2023-2027, élaboré par la Fondation du Mont-Saint-Bruno et Nature-Action Québec en 2023, on cible « la sensibilisation à l’impact de la circulation hors des sentiers balisés, surtout dans les secteurs vulnérables, et l’engagement des parties pour améliorer des sentiers de randonnée et de vélos dans les secteurs non vulnérables. »
Nous souhaitons arrimer les efforts de toutes les parties prenantes afin de développer une offre de sentiers balisés dans les milieux naturels accessibles au public, où des activités encadrées se déroulent dans les bonnes pratiques d’usage.
Nous pourrons ainsi proposer des solutions, particulièrement en ce qui a trait à un modèle des bonnes pratiques adaptées aux besoins spécifiques du mont Saint-Bruno. Ce modèle pourrait être utilisé par les propriétaires et usagers de plein air d’autres collines Montérégiennes.
Nous remercions Alain Fréchette et Anick Bribosia de nous avoir rencontrés.
Le projet de cohabitation et respect des usages est réalisé grâce au financement d’Environnement et Changement climatique Canada et de Nature-Action Québec.